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Les vidéos de Julie Chaffort mettent en scène des personnages, seuls, dans des paysages divers.

Ce paysage semble marqué par la présence humaine (éoliennes, poteaux, champs labouré, voitures…) Et pourtant chacun de ces personnages semble perdu, comme dans un monde à part, une parenthèse.

Chacun de ses personnages pose la question : qu’est-ce qu’on fait là ? La question reste en suspens durant chaque vidéo. Les personnages sont là, à ne pas savoir quoi faire ou alors à avoir une action qui serait de l’ordre de l’attente ou de l’ennui, de la recherche de quelque chose mais l’on ne sait pas quoi.

On dirait qu’ils sont là pour supporter le temps. Les êtres sont passifs et leur passivité semble active. Ils sont comme perdus dans le temps. Ils se doivent de supporter le temps, supporter la vie humaine tantôt lointaine (Variations), supporter son prochain (Équivoque), supporter leur propre existence (L'homme au frigo).

Ils sont comme rabaissés par la charge de leur existence. Mais cet abaissement ne semble pourtant pas une souffrance; il n’y a pas de pathétique: juste un constat du statut de ces êtres. Un abaissement volontaire, une suspension dans le temps. Ce sont des personnages sans éclat, des êtres humbles. Des êtres à l’écoute de leurs propres ressentis.



Some Sunny Days


Some Sunny Days est un film de conquête. Robert (l’homme à l’escargot) part à la recherche d’un frigo, « Je cherche un frigo », dit-il. Le sien est cassé. Il ne va tout bonnement pas en acheter un au supermarché du coin – de plus c’est dimanche, tous les magasins sont fermés – il tente de s’en faire donner un, sans succès, puis devant ce refus, de le voler, sans succès non plus. On pourrait croire à une quête si on file la métaphore du frigo (désir) manquant (objet). Mais, au hasard d’une rivière, Robert en trouve un (frigo). Plutôt, le fil de l’eau lui offre de manière irrationnelle (occasionnelle) un frigo sur un bateau gonflable (comme sur un plateau ( !))… Robert s’y risque et plonge, hisse le frigo, hésite un instant et décide tout de go de monter dans le bateau désormais vide.
Ce film n’est pas une quête (infinie), mais bien plutôt la conquête (indéfinie) de soi, de l’abandon des illusions : le frigo ne représente littéralement rien, sinon un objet du désir, un reflet, un double, vide et insignifiant, comme l’est l’autre Robert qu’il rencontre (l’homme qui chantonne et marmonne), miroir autiste. Robert aurait gagné un frigo, certes, mais il s’aperçoit, tout compte fait, qu’il est sans valeur et le laisse là. Naufrage du frigo.
Robert fini par faire ce que tout un chacun fait et qu’il faisait depuis le début : vivre, mais avec cette fois la conscience de le faire. La conquête de la lucidité et un indubitable acquiescement à la vie, avec ou sans frigo ça n’a pas tellement d’importance. Non pas une ascèse, hors du monde, depuis la berge, mais bien le contraire, une vie indéfinie et fragile, au milieu du courrant. Naufrage du double.
Christophe Ballangé 

Retrouvez toutes les infos du film (bande-annonce, extraits du film, photos, musique...) sur le blog:

En bref...

Cette suspension silencieuse, c’est la peur d’affronter. Ces personnages ne sont pas libres. Ils s'accrochent à la terre car ils ont peur. Peur d’avancer. Ils préfèrent l’absurdité à attendre ou à répéter une action au courage d’affronter : le vent, la pluie, la neige, le froid, la marche, l’effort que de s’affronter eux-même. Cependant, l’horizon les appelle toujours. Mais rien ne vient.

Le temps n’existe pas.

Ces personnages ont choisis une action pour l’éternité. Une répétition d’attitudes, de postures, de gestes à l’infini. C’est une espèce de revendication. Une volonté de lutte avec quelque - chose qui est plus fort qu’eux. Ils n’iront jamais ailleurs, ils ne changeront jamais de comportement. C'est une sorte de protestation. Comme un refus du monde qui les entoure. Ils ne sont pas exclus; ils s’excluent eux-même. Avec toujours cet horizon qui plane au loin, peut être pour dire que ce n’est pas forcement là que ça se passe mais ailleurs…

C'est absurde. Absurdité à ne pas vouloir, à refuser, à préférer s’accrocher à la terre, à quelque-chose de palpable, de rassurant. Mais la terre est dure aussi avec eux. Elle n’est pas toujours charitable, elle est hostile. Alors ils supportent leur refus du monde dans les conditions que leur impose la nature.